BRUXELLES : Le contrôle des importations de l’UE ne p…
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BRUXELLES : Le contrôle des importations de l’UE ne parvient pas à empêcher la présence de produits de la mer illégaux dans les assiettes européennes
L’Union européenne (UE) est le plus grand importateur mondial de produits de la mer.
Cependant, selon les estimations, un cinquième des captures mondiales de produits de la mer provient de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN). Ces produits, issus de la destruction de l’environnement, de graves violations des droits humains et de crimes tels que le travail forcé, finissent dans les assiettes des consommateurs européens. Compte tenu de cette forte exposition, les États membres de l’UE ont la responsabilité de protéger leurs citoyens et leur industrie de la pêche contre les dommages causés par l’entrée sur le marché de produits de la mer illégaux, selon un nouveau rapport de la EU IUU Fishing Coalition.
Un nouveau rapport de la EU IUU Fishing Coalition, composée de l’Environmental Justice Foundation (EJF), d’Oceana, de The Nature Conservancy, du Pew Charitable Trusts et de WWF EU, révèle que les contrôles à l’importation de l’UE ainsi que la mise en œuvre inadéquate des législations européennes existantes par les États membres permettent à des produits issus de la pêche illégale d’entrer sur le marché européen.
Il ressort de cette analyse, qui porte sur la mise en œuvre du règlement de l’UE sur la pêche INN entre 2020 et 2023, que certains pays ont systématiquement omis d’effectuer les contrôles les plus élémentaires sur les importations de produits de la mer. Ainsi, en 2022 et 2023, l’Italie n’a vérifié qu’un seul certificat de capture par an. Le Portugal en a vérifié cinq par an entre 2020 et 2023, refusant seulement deux cargaisons.
Cela les expose à un risque élevé d’importer des produits associés à des crimes contre l’homme et l’environnement. Plusieurs États membres ne procèdent à aucun contrôle adéquat des lots de produits de la mer en provenance de pays à haut risque, en omettant systématiquement de vérifier les certificats de capture destinés à prouver que le poisson a été pêché légalement.
Thomas Walsh, coordinateur de la EU IUU Fishing Coalition, a déclaré : « Dans toute l’UE, le nombre d’importations refusées sur le marché reste extrêmement faible, même dans les principaux pays importateurs de produits de la mer tels que l’Italie et le Portugal. Cette situation est aggravée par le non-respect généralisé par certains États membres de leur obligation légale d’inspecter au moins 5 % des débarquements directs effectués par des navires non européens. Le cas le plus préoccupant est celui des Pays-Bas, qui continuent de recevoir d’importants volumes de produits de la mer provenant d’États du pavillon à haut risque, dont la Russie, sans pour autant respecter cette exigence minimale en matière d’inspection ».
Selon le rapport, bien que l’Espagne, en revanche, inspecte plus de 70 % des débarquements directs, ses performances relativement bonnes sont compromises par l’approche laxiste des autres États membres. Cette mosaïque de mesures coercitives favorise le « contrôle shopping », qui consiste à acheminer les produits de la mer illégaux vers le marché européen en passant par les points d’entrée les moins contrôlés.
Steve Trent, PDG et fondateur de l’Environmental Justice Foundation, a déclaré : « Ces faiblesses créent des lacunes dangereuses dont profitent les opérateurs illégaux. Quinze ans après l’entrée en vigueur du règlement INN de l’UE, bien qu’il ait eu de multiples effets positifs, les États membres ne font toujours pas assez pour protéger les consommateurs, les pêcheurs licites et nos océans. Chaque défaillance dans le contrôle des importations à haut risque est une invitation directe adressée aux opérateurs illégaux, chaque faille sape les efforts des pays qui prennent leurs responsabilités au sérieux. La Commission européenne doit utiliser tous les outils à sa disposition pour demander des comptes aux États membres négligents ».
La Coalition souligne que, bien que la numérisation des contrôles à l’importation grâce au système CATCH soit une avancée positive, les solutions technologiques ne peuvent à elles seules remédier aux défaillances systémiques, telles que la nécessité d’augmenter les inspections physiques des débarquements directs.
Nikolas Evangelides, chargé de mission au Pew Charitable Trusts, a déclaré : « L’efficacité des règles en matière de pêche illégale dépend de leur mise en œuvre, et les États membres de l’Union européenne ne respectent pas leurs engagements. En n’utilisant pas pleinement les outils prévus par le règlement de l’UE sur la pêche INN, les gouvernements risquent d’affaiblir la chaîne d’approvisionnement en produits de la mer, de permettre la mise sur le marché de captures à haut risque et de laisser se poursuivre les opérations de pêche illégale sans contrôle. Afin de protéger les écosystèmes océaniques, la sécurité alimentaire mondiale et les populations qui dépendent d’une pêche saine et durable, ces gouvernements doivent prendre des mesures immédiates pour améliorer les inspections des navires de pêche, renforcer la transparence des données et mettre fin au débarquement des captures illégales ».
Notes aux rédacteurs.
Le rapport souligne l’importance pour la Commission européenne de demander des comptes aux États membres en engageant des procédures d’infraction à l’encontre de ceux qui manquent systématiquement à leurs obligations. En juin, la Commission européenne a ouvert une procédure d’infraction à l’encontre du Portugal pour ne pas avoir correctement appliqué les règles de l’UE contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), invoquant des lacunes importantes dans l’application du système européen de certification des captures. Elle recommande également d’améliorer la transparence en publiant des données complètes sur la mise en œuvre et en encourageant un renforcement des rapports afin d’identifier les mauvais élèves. Les États membres doivent également multiplier les inspections et allouer des ressources suffisantes pour contrôler efficacement les importations. Ils devraient refuser l’entrée des cargaisons liées à la pêche illégale et cesser de censurer une grande partie des rapports biennaux, qui devraient être accessibles aux parties prenantes et à la société civile.
La lettre de mission du nouveau commissaire chargé de la pêche et des océans, Costas Kadis, appelle à agir pour garantir des conditions de concurrence équitables et protéger les pêcheries de l’UE contre la concurrence déloyale. Veiller à ce que tous les États membres appliquent correctement le règlement INN est l’un des moyens les plus efficaces de respecter cet engagement et de protéger les consommateurs de l’UE contre les produits de la mer liés à des crimes environnementaux et à des violations des droits de l’homme.
Chiffres clés
- L’UE est le plus grand importateur mondial de produits de la mer, dont 69 % proviennent de pays tiers. En 2023, les importations en provenance de pays tiers représentaient 30,1 milliards d’euros. On estime qu’un produit de la mer sur cinq dans le monde est lié à la pêche INN, souvent associée à la destruction de l’environnement et au travail forcé.
- Malgré des règles très strictes sur le papier, les États membres ne parviennent pas à les faire respecter. Entre 2020 et 2023, seuls 0,29 % des quelque 800 000 certificats de capture reçus de pays tiers ont été vérifiés auprès des États du pavillon, et seulement 0,01 % ont été refusés.
- Alors que les principaux importateurs, l’Italie et le Portugal, n’ont pratiquement effectué aucun contrôle de vérification et n’ont refusé pratiquement aucune importation, l’Espagne et l’Allemagne ont été les pays qui ont appliqué les contrôles les plus stricts. Les Pays-Bas, point d’arrivée clé pour les navires russes, ont inspecté moins de 4 % des débarquements directs provenant de pays tiers, ce qui est inférieur au minimum légal de 5 %.
- À partir de 2026, le nouveau système numérique de certification des captures (CATCH) de l’UE sera obligatoire. S’il permettra d’améliorer l’efficacité, il ne pourra toutefois pas remédier aux défaillances systémiques telles que la faiblesse des processus de vérification, d’inspection et de refus. Il est urgent que les États membres et la Commission européenne renforcent les mesures d’application.
À propos de l’EU IUU Fishing Coalition.
La EU IUU Fishing Coalition, composée de l’Environmental Justice Foundation (EJF), d’Oceana, de The Nature Conservancy, du Pew Charitable Trusts et du WWF EU, travaille à promouvoir le leadership de l’UE dans l’amélioration de la transparence et de la gouvernance mondiales dans le domaine de la pêche afin de mettre fin à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN).
À propos d’EJF.
Notre travail en faveur de la justice environnementale vise à protéger le climat mondial, les océans, les forêts, les zones humides et la faune sauvage, ainsi qu’à défendre le droit fondamental à un environnement naturel sûr, en reconnaissant que tous les autres droits en dépendent. EJF œuvre à l’échelle internationale pour informer les décideurs politiques et promouvoir des réformes systémiques et durables afin de protéger notre environnement et de défendre les droits humains. Nous enquêtons et dénonçons les abus, et soutenons les défenseurs de l’environnement, les peuples autochtones, les communautés et les journalistes indépendants qui sont en première ligne face à l’injustice environnementale. Nos campagnes visent à garantir un avenir pacifique, équitable et durable. Nos enquêteurs, chercheurs, cinéastes et militants travaillent avec des partenaires locaux et des défenseurs de l’environnement à travers le monde.