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PARIS : L’IA est déjà dans les classes (et on ne l’avait pas vu venir si vite)

Qui aurait imaginé, en décembre 2022, lorsque ChatGPT 3.5 est apparu, que l’intelligence artificielle (IA) deviendrait un pilier de l’école?

 Les élèves, prompts à détourner l’outil pour tricher, ont déclenché une première réaction de méfiance dans les établissements. Mais rapidement, une autre question s’est imposée : et si l’IA devenait une alliée pour l’apprentissage, comme Wikipedia l’a été il y a plus de 20 ans ?

Deux années sont passées et l’IA ne se réduit plus à ChatGPT. Chaque mois, de nouvelles solutions apparaissent. D’ailleurs, le gouvernement a très vite pris la balle au bond avec l’IA en lançant une grande expérimentation l’année dernière avec MIA, un logiciel d’apprentissage sur mesure, pour les classes de seconde dans un premier temps. De leur côté, les lycées et les étudiants ont diversifié leurs pratiques et se passionnent en ce moment pour les nouveaux outils comme Perplexity et NoteBookLM, plus spécialisés sur la recherche de sources et la synthèse de documents. Il n’aura donc pas fallu longtemps pour que ces solutions s’intègrent aux pratiques des élèves pour leurs devoirs et des enseignants pour la préparation des cours et des exercices.

Comme dans le monde économique, l’IA s’impose peu à peu dans tout l’écosystème éducatif. Pour les enseignants, elle devient un outil suivi de la progression des élèves, d’organisation des emplois du temps, de préparation de cours ou d’exercices… Mais aussi un enjeu d’éducation et d’apprentissage à transmettre aux élèves : comprendre les biais de ces outils développés dans le contexte culturel de la Silicon Valley, les problématiques éthiques, être capable d’évaluer la fiabilité des réponses… Et surtout, quels seront les effets à terme sur nos capacités intellectuelles si nous déléguons à l’IA le soin de lire, structurer, apprendre voire penser à notre place.

Les enseignants se trouvent avec une mission supplémentaire : accompagner leurs élèves, en particulier ceux de milieux modestes, vers l’appropriation de ces outils et d’en faire un moyen de progresser dans leurs apprentissages. Pour bien comprendre l’enjeu actuel, il existe déjà une importante inégalité dans la maîtrise du numérique entre enfants de milieux aisés et de milieux modestes. Les experts estiment que l’IA ne ferait qu’accentuer cet écart. L’écart numérique est surtout révélateur d’un autre écart entre les milieux aisés et modestes : la stratégie d’apprentissage (métacognition en langage savant).

Si la stratégie d’apprentissage est particulièrement développée dans les milieux aisés, c’est parce qu’elle est liée au capital socio-culturel et aux implicites dans les échanges entre parents et enfants. Elle se retrouve naturellement dans la manière dont les jeunes utilisent les outils numériques. Pour autant, il y a une formidable opportunité pour les jeunes de milieux modestes avec l’IA. En les sensibilisant et formant à son usage pour les stratégies d’apprentissage, il devient possible de compenser le décalage.

Par exemple, sur NoteBookLM, on peut à partir de n’importe quel document de cours obtenir des guides de compréhension où les principales notions sont mises en avant, synthétisées, explicitées en glossaire. Si on porte l’accent sur cette approche plutôt que de rentrer son sujet dans ChatGPT pour obtenir une dissertation clé en main ou le résultat d’un exercice de maths, on permet à l’enfant ou l’adolescent d’avoir davantage de clés en main pour progresser. Pour cela il faut impérativement des adultes maîtrisant l’IA et des objectifs pédagogiques en rapport.

La bonne nouvelle est que les associations se saisissent d’ores et déjà de ces enjeux. Ainsi, Entreprendre Pour Apprendre vient de faire évoluer son programme de Mini-Entreprise pour qu’il forme les élèves à utiliser l’IA avec discernement, leur donnant des bases pour en faire un levier d’apprentissage et non un substitut à la réflexion.

L’IA est déjà là, mais le travail pour s’en saisir dans le domaine de l’éducation ne fait que commencer. Nous, Fondation AlphaOmega, veillerons à ce que ce changement de paradigme de l’apprentissage soit une chance pour la réussite éducative des jeunes de milieux modestes et nous accompagnerons les associations qui oeuvrent sur le terrain dans ce sens.

Elisabeth Elkrief, directrice générale de la Fondation AlphaOmega

SOURCE : Fondation AlphaOmega – Lettre spéciale Intelligence artificielle et éducation.