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PARIS : « Avec Les Collectifs, les salariés accélèrent la…

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PARIS : « Avec Les Collectifs, les salariés accélèrent la transition écologique dans leur entreprise »

Paul Chalabreysse travaille pour Les Collectifs, une association créée il y a trois ans par 27 groupes de salariés engagés pour l’écologie.

Aujourd’hui, l’association compte 120 collectifs qui veulent accélérer la transition écologique dans leurs organisations. Mais quelles sont leurs actions, leurs objectifs et leurs résultats ? Nous l’avons interrogé pour en savoir plus.

Paul, qui sont les « collectifs de salariés » ?
Paul Chalabreysse 
Il s’agit de groupes de salariés se réunissant régulièrement pour mener des actions pour la transition écologique dans leur entreprise. Tous bénévoles et engagés, leur objectif est de transformer leur entreprise en profondeur. Nous observons une grande diversité d’âges et de maturité dans ces collectifs. Le plus important compte 2 000 membres, le plus petit, cinq. Certains salariés se constituent en collectif à l’échelle d’une filiale, d’autres sur un site en particulier, d’autres à l’international sur plusieurs sites à la fois… Toutes les configurations sont possibles ! Ce que je constate, c’est que des salariés sont déterminés à s’engager en interne. Ils veulent savoir comment mobiliser leurs collègues, comment définir les intentions du groupe, comment se dévoiler vis-à-vis de la direction RSE, la direction générale et le reste des salariés, etc. C’est une belle aventure.
Et ça marche ?
P. C. 
Oui ! Le collectif Rhizome d’EDF a remporté de belles victoires par exemple. Ses 1 700 membres, issus de différents services, arrivent à faire avancer la question environnementale dans le dialogue. Au niveau national, ils se sont lancés par un premier webinaire, puis ont rapidement décliné des actions. À Marseille, ils ont réussi à faire supprimer 560 000 gobelets en plastique par an dans l’entreprise, obtenu la certification en refuge LPO et créé un réseau de cyclistes. À Lyon, ils ont impulsé la création d’un atelier de réparation de vélo et la mise en place d’un parking dédié aux mobilités douces. À Saclay, ils ont déployé auprès des équipes R&D un mailing mensuel autour de l’éco-responsabilité. On pourrait aussi citer d’autres actions, comme, par exemple des collectifs qui ont créé une fresque de l’assurance responsable, ont poussé de nouvelles politiques d’achats ou l’évolution de la R&D… Une chose est sûre : ça fonctionne.
Globalement, quelles sont leurs actions ?
P. C. 
Chaque collectif de salariés mène ses propres actions, avec le soutien de l’association. Des actions de sensibilisation et de formation sont réalisées, comme la Fresque du Climat ou encore des conférences. D’autres actions portent davantage sur les pratiques internes à l’entreprise, sur l’exemplarité et les process des métiers. Les salariés mènent des actions sur les pratiques internes à l’entreprise (énergie, mobilité, déchets, restauration) ainsi que sur la transition écologique de leurs métiers (R&D, achats, économie circulaire, etc.).

Au-delà des actions éco-responsables, les salariés veulent aussi être parties prenantes sur les questions de stratégie. Certaines actions touchent donc au modèle d’activité et à la gouvernance de l’entreprise et s’inscrivent dans un temps plus long. Certains collectifs deviennent des shadow COMEX qui formulent systématiquement des propositions alternatives plus écologiques, d’autres ont obtenu des points réguliers avec la direction de l’entreprise, certains encore obtiennent un droit de regard sur des investissements, la communication, etc. Les Collectifs ont créé un cadre mais ce sont les salariés qui sont le moteur de l’action.

On peut créer un collectif dans n’importe quelle entreprise ?
P. C. 
Oui. Actuellement, les collectifs sont majoritairement implantés dans les grandes entreprises et les sociétés de conseil. Plus de la moitié des entreprises du CAC40 a un collectif de salariés. Le réseau doit maintenant s’étendre vers les plus petites entreprises et en dehors de son épicentre parisien. Des rencontres locales sont organisées dans 10 villes de France tous les deux mois et les collectifs de salariés naissent peu à peu sur tout le territoire français, dans des PME et ETI, mais aussi dans le secteur public et parapublic comme les collectivités, hôpitaux et administrations.
Comment les collectifs communiquent-ils entre eux d’une entreprise à l’autre ?
P. C. 
Il y a les rencontres locales bien sûr, mais aussi le partage d’informations via des webinaires et des mises en relation informelles organisées par l’association. Les Collectifs se veut un facilitateur et un réseau d’entraide, et nous avons aussi nos propres outils de communauté interne. Nous avons mis en ligne sur notre site l’Atlas des Actions, qui répertorie tout ce qui a déjà été réalisé. Le but étant bien sûr de donner des idées aux salariés partout en France. Quand plusieurs collectifs nous posent la même question, on les aide à créer un groupe thématique inter-collectif pour creuser le sujet ensemble. C’est ainsi que sont nés des groupes sur l’épargne salariale, la politique voyages d’affaires ou encore l’éco-anxiété.
Quel est aujourd’hui l’obstacle le plus important ?
P. C. 
La principale difficulté, c’est le temps. Parfois les personnes peuvent décaler un peu leurs horaires, sinon elles prennent du temps sur la pause de midi ou le soir, bref, sur leur temps personnel. Par ailleurs, il est plus compliqué de monter un collectif dans une usine où les ouvriers travaillent en 3/8 que dans un siège social où il n’y a que des cadres. Mais ce n’est pas impossible ! Cette question du temps est déterminante, c’est ce qui fait qu’un engagement va durer un, deux ou trois ans. Il faut alors réussir à renouveler les membres, ou bien « officialiser » sur la fiche de poste ce temps consacré au collectif, en accord avec la Direction. Être membre d’un collectif de salariés, c’est un vrai investissement ! Parfois, un recrutement spécifique est organisé pour animer le collectif, par exemple une personne en alternance.
Et au-delà du temps… ?
P. C. 
Il faut veiller à maintenir la motivation des membres. Elle dépend beaucoup de leur capacité à mener des actions. Autrement dit, le positionnement de la Direction vis-à-vis des salariés joue beaucoup dans l’action des collectifs. Si leurs propositions ne sont jamais acceptées, comment continuer la mobilisation ? Il faut que le management comprenne ce qu’est un collectif, qu’il perçoive en quoi cela peut être une opportunité pour l’entreprise et une source d’intelligence collective. Un collectif de salariés est un accélérateur de la transition écologique.
Peut-on dire que le mouvement des éco-taffeurs est lancé ?
P. C. 
Pour l’association Les Collectifs, c’est une certitude. Le bouche-à-oreille et la couverture média assurent au mouvement une dynamique grandissante. Reste cependant à conquérir des secteurs encore peu touchés par cet élan, comme la grande distribution ou la métallurgie, ou des zones géographiques spécifiques, Toulon et Nice n’ayant peu ou pas de collectif alors que Rennes et le Pays basque en ont déjà plusieurs.
Vous collaborez en ce moment avec l’ADEME, vous pouvez nous en dire plus ?
P. C. 
Oui, nous sommes en train de créer avec l’ADEME un parcours de formation basé sur un MOOC et un programme d’accompagnement en pair à pair, afin d’aider les salariés dans trois cas de figures : créer leur collectif, devenir une partie prenante reconnue en interne dans leur entreprise et pérenniser leur collectif dans le temps. L’association proposait déjà un programme d’accompagnement mais avec ce parcours, nous allons pouvoir professionnaliser davantage les conseils.

SOURCE : ADEME INFOS.