PARIS : Asterès analyse les difficultés économiques de la…
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PARIS : Asterès analyse les difficultés économiques de la Chine
Les difficultés économiques de la Chine semblent être plus structurelles que conjoncturelles.
La forte croissance du pays a été tirée par l’industrialisation et l’urbanisation du pays, des changements qui sont désormais réalisés et qui ne peuvent plus servir de moteur économique. Le pays souffre d’un profond déséquilibre, avec un niveau excessif d’investissements dans l’immobilier et une consommation insuffisante, une problème de fond qui sera long à régler. D’autres difficultés, comme la démographie, les tensions géopolitiques ou le repli des exportations pèseront sur l’activité. Dans ce contexte, il ne semble pas exister de solution simple pour relancer la croissance.
- DYNAMIQUE DE CROISSANCE : UN ESSOUFLEMENT structurel
Le ralentissement de la croissance chinoise semble être un phénomène plus structurel que conjoncturel. Après une vingtaine d’années avec une croissance aux alentours de 10 %, la croissance chinoise ralentit régulièrement (hors soubresauts liés au Covid) depuis le début des années 2010. Depuis une quarantaine d’années, la Chine est passée d’un pays rural, principalement composé d’agricluteurs travaillant dans des fermes peu mécanisées, à un pays urbain où les habitants ont fortement gagné en productivité en migrant vers des métiers de l’industrie et des services. Cette évolution s’est accompagnée d’un gigantesque besoin d’investissement pour construire les logements et les infrastructures nécessaires aux nouveux urbains. Maintenant que la Chine s’est transormée en une économie industrielle urbaine, les gains de productivité diminuent, entraînant une baisse tendancielle de la croissance, ce qui correspond à une évolution naturelle et attendue de la dynamique économique du pays.
- Déséquilibres du marché immobilier : la principale vunérabilité de l’économie chinoise
La construction immobilière, qui a été un des moteurs de l’économie chinoise, est en train de devenir son principal handicap. Le modèle chinois est basé sur une épargne élevée de la population, qui génère un fort niveau d’investissement (puisque des contrôles de capitaux freinent les placements à l’étranger). Les Chinois épargnent environ 35 % de leurs revenus1 (contre environ 16 % en France ces dernières années2 ) notamment du fait de la faiblesse de la protection sociale qui pousse la population à se constituer une épargne de précaution. Il en résulte un niveau d’investissement qui représente 40 % du PIB contre environ 27 % en France3 . Cet investissement se concentre principalement dans la constrcution, comme en témoigne la consommation chinoise de ciment qui représente plus de la moitié du total de la consommation modiale4 . Ce modèle a permis de stimuler la croissance, mais il devient un handicap quand l’ensemble de la population possède un logement et que la construction ne devient plus que sépculative. Cette frénésie de construction explique le succès, puis les difficultés, de promoteurs tels qu’Evergrande ou Country Garden.
- Démographie, politique, exportations : des freins qui se multiplient
Les difficultés de l’économie chinoise sont plus larges que le seul secteur immobilier. La démographie, qui avait été un moteur de la croissance, commence à devenir un frein. Le raidissement politique se répercute sur l’économie, tant à l’intérieur du pays qu’à l’international. Enfin les exportations, longtemps moteur de la croissance, semblent marquer le pas.
– Le « dividende démographique » est terminé. Après avoir instauré une politique de « l’enfant unique » à la fin des années 1970, la Chine a bénéficié d’un « dividende démographique » : les enfants et les retraités (nécessitant des dépenses d’éducation ou de santé) étaient peu nombreux comparés à la population en âge de travailler. La situation est cependant en train de s’inverser, avec une population en âge de travailler qui stagne globalement depuis 2015 et qui devrait commencer à baisser sensiblement à partir de 20275 .
– L’attitude autoritaire du pouvoir chinois est un obstacle à la croissance. Sur la scène internationale, le gouvernement chinois s’oppose de plus en plus frontalement aux Etats-Unis. Il en résulte des réactions américaines limitant les exportations de semi-conduteurs à la Chine ou les investissements américains dans des secteurs jugés technologiquement sensibles. L’hostilité affichée envers Taïwan pourrait également déboucher sur des mesures de rétorsion commerciale si la situation venait à s’envenimer. A l’intérieur du pays, la poigne du gouvernement pèse aussi sur certains secteurs, comme l’ont montré les règlementations soudaines sur le secteur de l’enseignement à domicile ou des jeux vidéos. La décision de ne plus publier les chiffres du chômage des jeunes, en augmentation régulière, traduit une gestion autoritaire de l’économie qui fait passer les objectifs politiques avant les préoccupations économiques6 .
– Les exportations s’essouflent. Les exportations chinoises ont été un des moteurs de la croissance du pays. Depuis un pic fin 2021, elles sont cependant sur une tendance baissière qui peut avoir trois explications : les achats importants de biens pendant le Covid (équipement informatique ou d’ameublement par exemple) sont désormais terminés, l’inflation pèse sur le pouvoir d’achat en Europe et aux Etats-Unis, pénalisant la consommation des ménages et les entreprises cherchent à limiter leur dépendance à la Chine dans leurs chaînes d’approvisionnement (en lien avec la hausse des tensions géopolitiques abordée précédemment).
- Prospective : une croissance difficile à stimuler
Le rythme de la croissance chinoise devrait poursuivre sa trajectoire baissière dans les années à venir. La croissance chinoise devrait être inférieure à 5 % dans les années à venir et se rapprocher d’un rythme aux alentours de 2 % à 3 %, assez semblable à la croissance américaine. Une crise plus grave, liée par exemple à un effondrement de l’immobilier ou à des tensions géopolitiques croissantes, ne peut pas être exclue. Les remèdes habituels fonctionnent de moins en moins bien. Par le passé, le gouvernement chinois a eu recours à des plans de dépenses budgétaires (investissement en infrastructure notamment) pour relancer la croissance lorsqu’elle faiblissait.
Cela a notamment été le cas suite à la crise de 2008. Cependant, ces plans fonctionneraient moins aujourd’hui, dans un contexte marqué par un excès de construction et une hausse de l’endettement. La Banque Centrale est engagée dans une baisse des taux pour stimuler l’activité, mais cela ne résoud pas les problèmes structurels. Il n’existe pas de solution simple face aux difficultés de l’économie chinoise. La démographie ne peut pas être modifiée rapidement et le gouvernement ne semble pas être disposé à modifier son attitude politique dure, tant sur la scène internationale que domestique. Les déséquilibres de l’économie chinoise – excès d’épargne et d’investissement – sont longs et douloureux à résorber.
Il serait nécessaire d’améliorer la protection sociale pour inciter les ménages à moins épargner, ce qui n’est possible qu’à long terme. La baisse nécessaire de la construction sera une évolution coûteuse à court terme, puisqu’elle entraînera des faillites auprès des entrepries du secteur. Il n’existe donc pas de solution simple aux difficultés de l’économie chinoise, et un éventuel rebond du rythme de croissance ne semble pas possible dans les années à venir.