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TOULON : François de Canson : « La Méditerranée, c’es…

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TOULON : François de Canson : « La Méditerranée, c’est le théâtre du monde et la conscience de l’histoire »

Les 8 octobre à Toulon, à l’occasion des RSMed – Rencontres Stratégiques de la Méditerranée (FMES), François de Canson, vice-président de la Région Sud, a rappelé l’importance stratégique de la Méditerranée.

L’intervention de François de Canson :

« C’est ici, à Toulon, port de la vigilance et du courage, que la France regarde la Méditerranée.
Et c’est ici, à l’invitation de la Fondation Méditerranéenne d’Études Stratégiques, que nous ouvrons cette quatrième édition des Rencontres Stratégiques de la Méditerranée, devenues en quelques années un lieu de pensée rare — un lieu où l’on parle du monde sans illusion, mais sans renoncement. 
Parce que c’est ici que s’éprouve la lucidité française.

C’est ici, dans cette ville symbole de notre cohésion nationale, que se croisent la mémoire et l’avenir.

Ici, tout parle d’histoire et d’avenir. Toulon, c’est le port des escadres, des départs, des veilles de tempête. Mais c’est aussi le port de la jeunesse, des savoirs et de l’innovation. La Méditerranée est un peu le théâtre du monde et la conscience de l’histoire.  La Méditerranée n’est pas juste une mer. C’est une blessure et une promesse. Une blessure, parce qu’elle porte en elle la trace des guerres, des exils, des naufrages et des divisions religieuses. Une promesse, parce qu’elle a vu naître les trois monothéismes, et qu’elle garde au cœur des peuples l’idée que l’homme n’est jamais condamné à la haine. Cette mer, à la fois charnelle et spirituelle, a vu passer les croix et les croissants, les voiles et les galères, les armes et les Évangiles. Elle fut le berceau des civilisations et des dogmes, des empires et des philosophies. Et c’est pourquoi elle est plus qu’un espace géographique : c’est un espace moral, où l’humanité s’interroge encore sur son destin.

Aujourd’hui, la Méditerranée concentre toutes les fractures du monde moderne :

les guerres visibles et invisibles, les migrations forcées, les dérèglements climatiques, les fractures identitaires, les rivalités d’influence, les manipulations religieuses, et parfois la perte du sens même de la vérité.

Mais elle demeure aussi ce lieu d’équilibre fragile où la foi, la raison et la mémoire tentent encore de se parler.

Paul Valéry écrivait : « La Méditerranée, ce sont cent choses à la fois. Ce n’est pas un paysage, mais un espace mouvant, où tout se recommence ».

Oui, tout s’y recommence : les échanges, les conflits, les renaissances. Et dans cette mer du monde, la France doit garder une place à part — celle d’une puissance d’équilibre, héritière d’un message universel qui unit la force et la mesure, la foi et la liberté. Alors la FMES devient le creuset d’une pensée stratégique française. La Fondation Méditerranéenne d’Études Stratégiques est aujourd’hui l’une des consciences les plus éclairées de la Méditerranée. Sous l’autorité de l’Amiral Pascal Ausseur, elle a su tisser un lien rare entre les Armées, les chercheurs, les industriels et les jeunes.

La FMES n’est pas un simple institut : c’est une école de lucidité.

Un lieu où se fabrique ce bien rare et précieux : la conscience stratégique française. Elle enseigne la vigilance, le discernement, l’esprit critique — ces vertus qui sont, dans nos sociétés ouvertes, les armes les plus précieuses. Elle a compris avant beaucoup d’autres que la sécurité ne se décrète pas : elle se pense, elle se partage, elle se protège. Et dans une époque où la désinformation sème le doute, où les menaces cyber et les attaques réputationnelles sapent la confiance, la FMES agit comme un rempart intellectuel.

Elle défend cette idée essentielle : une Nation qui pense est une Nation qui se défend.

Et elle rappelle, comme le disait Raymond Aron, que « penser la guerre, c’est déjà agir pour la paix. »

C’est une nécessité avec le retour du tragique et l’injonction de dignité des peuples.

Nous vivons le retour brutal du tragique dans l’histoire.
La guerre de haute intensité n’est plus une hypothèse d’école. Elle est revenue frapper l’Europe, rappeler au monde que la paix n’est jamais acquise, et que la liberté se défend chaque jour.

Des otages attendent dans le silence, des familles espèrent, des enfants voient s’effondrer le monde avant même de l’avoir compris.

Les peuples libres n’ont pas le droit d’être naïfs : le monde appartient à ceux qui veillent.
Et veiller, c’est d’abord refuser la confusion morale.

Veiller, c’est plus que protéger : c’est tenir.
C’est garder vivante la part la plus haute de nous-mêmes, celle qui distingue la vigilance du soupçon, la fermeté de la haine.
C’est refuser d’importer ici les guerres des autres, de prêter nos rues, nos écoles, nos cœurs aux colères du monde.
C’est déjouer les manipulations qui veulent transformer nos convictions en fractures, et nos différences en faiblesses.

Mais veiller, c’est aussi rester capables de compassion.
Car la compassion n’est pas faiblesse : elle est la marque des peuples forts,
ceux qui savent pleurer sans renoncer, tendre la main sans se désarmer, comprendre sans se confondre.

La compassion, c’est la conscience du monde lorsqu’il vacille.
Elle nous rappelle ce que nous défendons : la dignité humaine, la justice, la liberté

Le général de Gaulle l’avait dit : « La France n’est elle-même que lorsqu’elle est au premier rang des combats pour la liberté du monde ».

Cette phrase n’a rien perdu de sa vérité. Car dans le chaos du monde, la liberté est redevenue un combat spirituel autant que militaire. Ici, nous avons fait le choix d’une économie de défense territoriale. Face à ces défis, la Région Sud agit. Nous avons fait de la défense non pas un discours, mais une politique. Première région de France en termes de personnel du Ministère des Armées, première pour le foncier militaire, première à avoir signé une convention avec le ministère des Armées, la Région Sud a choisi d’assumer son rôle de région de souveraineté.

Nous avons bâti une politique de long terme :

soutien au tissu de la Base Industrielle et Technologique de Défense,

développement des filières stratégiques,

sécurisation des actifs sensibles,

renforcement des formations industrielles et militaires.

Avec la DGA et la FMES, nous avons créé le Parcours Défense, pour aider nos entreprises à coopérer, à exporter, à innover, à se protéger. Et nous franchirons bientôt un nouveau cap avec l’Opération d’Intérêt Régional Sécurité-Défense.

Nous faisons le choix de la puissance par l’unité.

Un écosystème dédié  aux forces armées, aux chercheurs, aux industriels et aux territoires, pour bâtir la souveraineté industrielle du futur.

Des financements conjoints de la Région, de l’État et de l’Europe viendront donner à cette ambition la force de l’action.

Car la souveraineté n’est pas un concept : c’est une chaîne de compétences, de courage et de confiance. Et dans cette chaîne, le Sud doit être un maillon fort, le laboratoire méditerranéen de la puissance française.  Mais la puissance d’une Nation ne réside pas seulement dans ses armes : elle se mesure à la clarté de sa jeunesse. Aujourd’hui, plus de 800 lycéens sont inscrits à ces Rencontres. Votre génération n’a pas connu la guerre, mais vous en ressentez déjà les ondes de choc : dans le coût de la vie, dans la fragilité des démocraties, dans la guerre de l’information. Parce qu’avant le courage, il y a la clarté. Avant la force, il y a la conscience.

Le réarmement intellectuel dont parle la FMES, c’est cela :

vous rendre les clés du discernement,

le goût du vrai,

le sens du collectif,

et la fierté d’appartenir à une Nation qui agit.

Et dans ce monde incertain, le premier champ de bataille, c’est la conscience. Le XXIᵉ siècle se joue donc en grande partie ici, dans cette mer intérieure qui unit trois continents et trois spiritualités. Entre Athènes et Jérusalem, entre Rome et Le Caire, entre Marseille et Alger, c’est ici que se croisent les routes de la foi, du commerce et de la puissance. C’est ici que s’écrit le combat des démocraties contre les empires autoritaires. C’est ici que se jouent les nouvelles dépendances — énergétiques, numériques, maritimes. Et c’est ici aussi que se joue le destin de l’Europe. Dans la lumière de cette mer, la France doit redevenir ce qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être : une puissance d’équilibre, de dialogue et de souveraineté.

Renaud Muselier le dit souvent : « Le Sud, c’est la France dans toute sa vérité : ouverte, fière, courageuse et lucide ».

Cette vérité est notre force.

Nous ne cédons ni à la peur, ni à la naïveté. Nous croyons en la cohésion nationale, en la mémoire, en la transmission. Ici, dans le Sud, nous savons que la sécurité, c’est aussi la continuité d’un héritage.
Celui de la foi, du travail, du courage et du service. 
La période est rude, mais n’interdit pas d’être grand. Et la vigilance n’est pas la peur : c’est la forme moderne du courage. Le monde aujourd’hui, nous reparle de souffrance et de chaos, mais aussi de fraternité et de promesse ».

Photos PRESSE AGENCE – LA GAZETTE DU VAR.