TOULON : Du grain à moudre pour les Cafés Maurice
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TOULON : Du grain à moudre pour les Cafés Maurice
Sous la conduite dynamique et inspirée de Boris Touaty, dont le trisaïeul Marc Maurice Levy fonda les Cafés Maurice il y a 150 ans à Port au Prince (Haïti), l’entreprise livre une nouvelle mouture de sa saga toulonnaise.
Incarnant le renouveau de son histoire familiale cent cinquantenaire cette année, que l’on pourrait appeler « Café Maurice 2.0 », Boris Touaty porte avec passion l’aventure café innée de ses ancêtres. Cet épicurien intarissable sur sa saga toulonnaise, mais aussi sur les plaisirs gustatifs que procurent ses bons produits, jusqu’à la connaissance approfondie de toutes sortes d’appareils et d’accessoires pour faire le café (qu’il vend également), est conjointement un amoureux de son territoire, heureux d’en être devenu modestement un des acteurs économiques.
Que de cafés coulés dans les 150 ans qui séparent les deux époques, à commencer par la création de l’entreprise en 1875 par Marc Maurice Levy en Haïti, dans les Antilles, pays indépendant depuis 1804. Celui-ci travaille alors le café vert (grains de café extraits du fruit caféier), fait de l’import-export, s’essaie à la torréfaction et, sur le plan personnel, se marie à une alsacienne. La petite famille, agrandie de deux enfants, Marcel et Georges Levy, ses arrières-grand-père et oncle, rentre en France au début du 20e siècle et s’installe à Toulon où la frange maternelle Kauffmann est copropriétaire du grand magasin les Dames de France. L’unité de torréfaction et de vente de cafés, installée à l’angle du petit cours Lafayette, devient grande à la faveur d’une expansion commerciale dans tout le Var, les départements voisins, puis les régions environnantes et plus largement en France, tandis que sort de terre au début des années 30 un beau bâtiment industriel au quartier du Champ de Mars, premier de ce type en ce lieu qui, comme son nom l’indique, était un champ.
Victime de la mondialisation
Après la guerre qui n’épargne pas la famille, puisque l’arrière-grand-père décède à Auschwitz, l’entreprise connaît une nouvelle évolution, accélérée par l’arrivée à sa tête de Jean-Claude Maurice, petit-fils du créateur et grand-père de Boris, en 1961. Lequel évolue à contre-courant des tendances multiproduits, avec sa stratégie d’image de marque « un produit, un paquet, un conditionnement, une qualité ». C’est la sortie du fameux paquet orange qui fait décoller l’enseigne. « Un pari risqué consistant à ne faire qu’une seule chose, mais à la faire bien », conte Boris.
Fleurissante, faisant travailler jusqu’à 200 personnes, l’entreprise est petit à petit mise en difficulté par l’arrivée du café moulu en Europe, l’automatisation, la mondialisation qui suit les deux chocs pétroliers des années 70, l’arrivée massive des concurrents étrangers… L’histoire se termine en 1982 par la vente de la marque et des brevets à un industriel de Saint-Etienne à la tête de Casino, qui commercialisera les Cafés Maurice jusqu’à la fin du siècle dernier.
Seconde vie
Rebondissement quelques années plus tard, puisqu’une seconde vie entre en gestation à l’initiative de Boris Touaty. D’abord par l’entretien de la mémoire de ses ancêtres à travers un livre paru en 2011, alors qu’il est âgé de 19 ans à peine. Puis, après une brillante expérience de chef d’entreprise dans la Com, par son pari fou, à son tour, de relancer la machine en octobre 2020, en plein couvre-feu Covid, avec un petit coup de pouce inattendu. « L’activité de production nous fait passer dans les « essentiels », seuls secteurs autorisés à ouvrir à cette période, et comme la production s’effectue dans le magasin en plein centre de Toulon, nous faisons partie des rares boutiques ouvertes » !
L’essentiel est en l’occurrence dans le café qu’il conçoit à sa façon, par sa propre sélection sur place dans les pays producteurs, via des filières durables, bio ou équitables, de café vert de grande qualité acheté en moyenne 4 fois plus cher que les « gros » du secteur dans le monde, dont il supervise aussi la torréfaction. Un café de spécialité, artisanal, en grains, moulu, en capsules et dosettes compatibles avec l’essentiel… des machines sur le marché. Le concept séduit les particuliers et les professionnels, le célèbre club de rugby de Toulon (RCT) lui demande un café au design « rouge et noir », une 2e boutique est ouverte sur le port de Sanary en juillet 2023, joyau balnéaire de l’Ouest Var, puis une 3e boutique rue Lamalgue à Toulon, l’artère de référence du Mourillon. L’affaire est relancée, avec de la suite dans les idées !
Le volet e-commerce n’est pas oublié, les revendeurs en épicerie fine non plus, surtout dans la Métropole Toulon Provence Méditerranée au sein de laquelle il vient de s’engager dans un local commercial de 400 m2 qui devrait entrer en production au printemps. « Cela va permettre de monter en puissance, y compris dans les Bouches-du-Rhône et les Alpes-Maritimes. Nous n’avons pas vocation à aller loin, mais à être n°1 sur les territoires que nous investissons, par un travail d’artisan de proximité et de services », prône ce jeune dirigeant déjà aguerri, président par ailleurs de l’association de commerçants « Les Vitrines de Toulon ».
« Boss » du commerce
Ayant la bosse du commerce en ADN, et de plus en plus la taille patron dans la conduite de son entreprise de 17 personnes, il crée de nouvelles recettes au gré de ses désirs, de son imagination fertile et de ses partenariats gourmands, avec des biscuits, des chocolats, de la bière, du rhum, mais aussi avec un établissement de 10 ans son cadet, la Maison Jonquier, créée en 1885 à Ollioules ! Ensemble, ils lancent désormais « Les Ateliers du goût » dans un petit local au 28 rue Charles Poncy au cœur de Toulon, dédiés à la fabrication du nougat (grande spécialité Jonquier), de chocolats et de pâtes de fruits d’une part, ainsi que, côté Cafés Maurice, une plongée inédite dans l’univers de la caféologie, des méthodes douces d’extraction, des secrets de l’expresso et de l’art du latte.
Comme au bon vieux temps de l’âge d’or des publicités Maurice, dont la première en version télévisée avait été produite par Pierre Bellemare et réalisée par Pierre Tchernia, avec le duo des Frères ennemis en vedette, l’enseigne Cafés Maurice est à nouveau et par de nombreux canaux de diffusion sur le devant de la scène. Cerise (fruit du caféier) sur le gâteau, Boris Touaty semble avoir hérité de ce grain de folie entrepreneuriale qui donne corps aux projets fleurant bon le succès. Ce n’est pas la moindre des saveurs…
SOURCE : Var entreprises – Newsletter de janvier 2025.