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PARIS : Police et gendarmerie, une répartition territoria…

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PARIS : Police et gendarmerie, une répartition territoriale déséquilibrée

Une majorité de gendarmes sert en zone urbaine et périurbaine.

La répartition des zones de compétence entre la police et la gendarmerie nationales. COUR DES COMPTES  13.01.2025.

En France, la police et la gendarmerie nationales assurent conjointement les missions de sécurité et de paix publiques. Depuis le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur en 2009, elles dépendent de la même autorité politique. Les forces de sécurité intérieure emploient 253 000 policiers et gendarmes et bénéficient depuis plusieurs années d’un budget en hausse. Pour autant, la répartition territoriale des zones de compétence de la police et de la gendarmerie nationales a peu évolué au cours des 80 dernières années, malgré les modifications intervenues tant sur le plan de la démographie qu’en termes de délinquance. Entre lourdeurs décisionnelles et concurrence entre les deux forces, la carte des zones de compétence est totalement figée depuis dix ans. Face à ce constat, la Cour a analysé la répartition territoriale des forces de sécurité dans la double perspective de répondre au mieux aux besoins de la population en matière de sécurité et d’optimiser l’allocation des moyens publics. La répartition actuelle des forces, datée et incohérente, est source de dysfonctionnements et d’inefficiences au détriment du service rendu à la population. Il est désormais urgent que le ministère de l’intérieur s’empare de ce sujet et procède aux ajustements nécessaires.

Près de 60 % des gendarmes exercent dans des zones périurbaines

Les métropoles comptent une majorité de communes relevant de la compétence de la gendarmerie : 58 % des 970 communes intégrées aux 22 métropoles (EPCI de type métropole et métropole de Lyon) sont en zone gendarmerie, représentant 13 % de leurs habitants. Ces taux atteignent respectivement 67 % pour les communes et 20 % pour les habitants des métropoles autres que celle du Grand Paris, qui se trouve intégralement en zone police19. Dans six métropoles, la zone gendarmerie représente plus des trois-quarts des communes et plus du quart de la population.

Cette situation conduit à une articulation police – gendarmerie peu lisible autour des grandes agglomérations, pensée historiquement à l’échelle des communes. Or, la logique de métropolisation conduit à une imbrication croissante des communes (réseaux de transports en commun, centres commerciaux, continuité urbaine, etc.) et donc au développement de phénomènes de délinquance qui devraient être appréhendés à l’échelle de ces aires urbaines nouvelles et non des seules communes.
Pour reprendre l’exemple de Toulouse, la population et l’aire urbaine de la ville ont augmenté fortement depuis 2004, date de la dernière modification des zones police et gendarmerie. La circonscription de police nationale, qui ne couvre que quatre communes, se classe au quatrième rang des directions départementales de la police nationale les plus importantes en termes de volume d’activité (hors région parisienne).

Si la densité de population des communes de la zone gendarmerie est globalement inférieure à celles de la zone police, la répartition actuelle des zones police et gendarmerie montre des incohérences croissantes : 

– Inauguré en 2021 et ayant attiré en 2023 plus de 700 000 visiteurs, le parc des expositions et centre de conventions de Toulouse Métropole (MEETT) est intégralement situé en zone gendarmerie (communes d’Aussonne, Beauzelle et Cornebarrieu) ;

– Un centre de rétention administrative (CRA), du ressort de la police nationale, est situé sur la commune de Cornebarrieu, en zone gendarmerie.
Le site, décrit comme sensible par la gendarmerie, jouxte l’aéroport de Blagnac et la zone d’activité aéronautique située à proximité ; alors que la police est compétente sur les lignes de métro, plusieurs stations sont situées en zone gendarmerie. Dans ces cas (Balma, Gramont, Ramonville), le sous-sol relève de la police et la surface de la gendarmerie. Ces situations vont se multiplier avec le prolongement de la ligne C du métro et la création de nouvelles stations en zone gendarmerie.

Dès lors, la Cour recommande de transférer sans tarder à la gendarmerie nationale les petites circonscriptions de police classées comme vulnérables par la police nationale elle-même, en commençant par celles qui ne sont pas en mesure de remplir leurs missions opérationnelles.
Ce transfert pourrait être réalisé dès à présent, à droit constant, par arrêté du ministre de l’intérieur. La DGPN et la DGGN s’accordent déjà sur le transfert de 14 d’entre elles.
D’autre part, la présence majoritaire de la gendarmerie dans les communes des métropoles n’est pas optimale. Cette situation conduit à un enchevêtrement de zones et un maillage parfois décorrélé des infrastructures de transports ou de l’évolution de l’urbanisme. Outre un manque de lisibilité quant à la force territorialement compétente, ces incohérences font peser des risques sur la bonne articulation les forces au niveau local. La direction générale de la gendarmerie nationale estime qu’il appartient aux acteurs locaux de connaître les contours de cette répartition, qui demeure neutre pour l’usager (numéro unique 17, guichet unique, etc.).
Au contraire, la répartition des zones de compétence entre les forces devrait avant tout viser un objectif d’efficacité du service rendu aux usagers et d’efficience des moyens publics, indépendamment des logiques de concurrence entre forces. Dans ce contexte, la position de la gendarmerie est difficilement soutenable.
L’extension de la zone police autour des métropoles doit être réenvisagée, localement, au vu des continuités urbaines de la ville centre et des enjeux de délinquance associés. La police nationale y est favorable dès lors qu’il existe effectivement une continuité d’urbanisation et de délinquance – ce qui n’est pas systématiquement le cas. La gendarmerie y est opposée,
renvoyant à sa capacité à intervenir en milieu urbain et soulignant la satisfaction des élus locaux dans les communes concernées. Les décisions de transfert doivent reposer sur une analyse locale
permettant de mettre en évidence les cohérences géographiques et des enjeux de délinquance, différents dans chaque métropole. Ces études territoriales devront également confirmer la capacité effective de la police à étendre son périmètre géographique d’intervention, notamment en matière de police judiciaire et que la police s’engage à mobiliser les effectifs nécessaires pour assumer les extensions envisagées. Sous réserve que ces conditions soient réunies, la Cour recommande de transférer en zone police les communes intégrées à des métropoles présentant une continuité d’enjeux de délinquance avec la ville – centre. Les transferts correspondants pourraient être effectués à droit constant, sur décision du ministre de l’intérieur.