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PARIS : Nestlé, agriculture française pilote en Europe

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PARIS : Nestlé, agriculture française pilote en Europe

Avec ses fournisseurs et en partenariat avec Earthworm, Nestlé développe l’agriculture régénératrice.

La quasi-totalité de ses matières premières s’y convertissent progressivement. Entretien avec Charles Leonardi, directeur général développement durable de Nestlé France.
Pourquoi Nestlé a-t-il choisi d’intégrer les principes de l’agriculture régénératrice ?

Charles Leonardi : Nous avons travaillé sur les sols avant de nous appuyer sur ce concept. En France, notamment dans le Nord, on constatait déjà une forte érosion, et les agriculteurs s’en inquiétaient. Pour notre part, nous nous interrogions sur la pérennité de nos approvisionnements et sur la résilience de la chaîne alimentaire à long terme. Nos premiers pilotes remontent à 2018, déjà menés avec notre partenaire Earthworm Foundation¹. Des agriculteurs pionniers étaient volontaires pour tester de nouvelles méthodes. Nous nous sommes alors aperçus qu’au-delà de l’adaptation à l’érosion, ou plus généralement, au changement climatique, il fallait aussi une politique d’atténuation de ces phénomènes.

Est-ce une démarche d’emblée internationale ou a-t-elle été lancée dans certains pays puis étendue à d’autres ?

C. L. : Les pilotes français avaient été assez précurseurs. En 2019, Nestlé s’est doté au niveau mondial du Climate Pledge, feuille de route vers un net zéro carbone d’ici à 2050. Dans ce cadre, un pan entier de nos actions concernait l’agriculture car notre approvisionnement agricole représente plus de 60 % de notre empreinte carbone. En France, nous sommes même à 66 % avec nos quatorze usines ; c’est donc un chantier important et c’est pourquoi notre pays a été désigné comme pilote de l’agriculture régénératrice en Europe. Nous nous étions aperçus quelle pouvait avoir un impact positif sur le carbone, à la fois par la réduction de certaines pratiques et par la séquestration dans les sols. Nous avons accéléré nos engagements, d’autant qu’ils ont des répercussions sur la biodiversité, le cycle de l’eau, au-delà du carbone. En parallèle, le groupe développe dans d’autres régions du monde des programmes ambitieux sur le café et le cacao, mais il s’agit d’autres types d’actions.

Etant donné la multiplicité de vos produits, quels sont vos actions principales et les moyens mis en œuvre ?

C. L. : Nous avons commencé avec les ingrédients clés. En France, nous utilisons 900 000 tonnes de matières premières dans nos usines, dont 600 000 sont issues de l’agriculture française, pour moitié d’origine végétale, pour moitié d’origine animale ; la production de céréales – en premier lieu le blé – représente un fort volume. Nous avons donc commencé sur ces cultures, pour les activités petfood de Purina et céréales petit déjeuner de Cereal Partners, notre joint-venture avec General Mills. Ont suivi la betterave sucrière, également importante, ou la chicoré, pour Ricoré. Cela s’est révélé vertueux, car ces productions se trouvent souvent dans les mêmes zones géographiques, ce qui permet des regroupements dans la rotation de l’agriculteur avec certaines coopératives.

Couverts végétaux, diversité de la rotation et réduction du labour
Quelle part de votre approvisionnement est déjà dans la démarche ?

C. L. : Fin 2023, nous étions engagés sur 120 000 tonnes en ayant contractualisé avec 340 agriculteurs – nous travaillons avec un millier d’exploitations en France – et une quinzaine de coopératives, entreprises de négoce ou fournisseurs d’ingrédients intermédiaires. Cela ne signifie pas que les pratiques sont toutes en place, mais déjà 60 000 tonnes sont converties.

Pouvez-vous citer quelques actions particulièrement significatives ?

C. L. : Avec Earthworm Foundation, nous participons à un collectif d’entreprises, Sols Vivants, réunissant industriels, distributeurs ou instituts techniques. Nous n’avons pas imposé un cahier des charges mais travaillé à des pratiques à la fois scientifiquement valables et pratiquement applicables. Les trois principales sont bien connues : couverts végétaux, diversité de la rotation des cultures et réduction du labour.

Quels sont les premiers résultats ?

C. L. : L’évaluation a été travaillée avec les agriculteurs et des scientifiques selon la fertilité des sols, la rétention de matière organique, la séquestration du carbone. Nous avons déjà un historique, mais il nous reste à vérifier qu’il est bien représentatif dans la durée. C’est une difficulté de ce programme. Autant on sait comment accompagner de bonnes pratiques, autant le calcul de leur résultat, notamment du point de vue du carbone, est encore fluctuant, au niveau des cadres, des méthodes et des techniques. Nous restons donc prudents sur la publication de chiffres ; mais cela fait partie de l’apprentissage.

L’absence de référentiel ou de contrôles officiels n’est-il pas un handicap, favorisant le soupçon ?

C. L. : D’où notre vigilance et le recours à un comité scientifique indépendant. Cela ne lui posera aucun problème de ne pas valider une hypothèse si l’évolution de la recherche la met en question ; c’est une exigence. J’ajoute que pour accélérer la transition il faut rapidement simplifier la vie de l’amont, donc proposer aux agriculteurs un cadre technique harmonisé, ou du moins compatible. Et notre objectif est que les données qui nous sont communiquées soient à terme auditées.

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SOURCE : ILEC – La Voix des marques.