PARIS : Dépression infantile, symptôme d’une carenc…
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PARIS : Dépression infantile, symptôme d’une carence affective dès les premières heures de la vie
Vendredi 27 octobre, Journée Européene de la Dépression.
Même si le terme « dépression » est entré dans le langage médical au 18ème siècle, il est intéressant de noter qu’Hippocrate mentionnait déjà ces états mentaux pathologiques que sont la dépression » ou la « maladie dépressive. Aujourd’hui, selon l’Organisation Mondiale de la Santé, la dépression se situe au quatrième rang des maladies en termes de coût financier par maladie. Aujourd’hui, il se situe au deuxième rang pour la catégorie d’âge de 15 à 44 ans pour les deux sexes. Le suicide en est l’issue la plus tragique. On compte chaque année au niveau mondial 800 000 morts par suicide.
Cette maladie n’épargne personne. Tandis que le pourcentage d’adolescents déprimés augmente chaque année avec les conséquences dramatiques que l’on connaît, celui des enfants de 5 à 13 ans inquiète aujourd’hui les spécialistes de la santé mentale. Les nourrissons eux -même peuvent en être victimes.
La carence affective et la dépression du nourrisson :
La dépression du nourrisson, appelée également hospitalisme, est encore mal connue et il est difficile de s’imaginer qu’un enfant qui vient de naître ou celui qui a entre 2 et 5 ans puisse développer une maladie dérégulant son humeur.
La dépression du nourrisson a été conceptualisée pour la première fois en 1946 par le psychanalyste René Spitz. Pour ce chercheur, l’enfant en carence affective passe par différentes étapes : le premier mois de séparation, il pleure, crie et cherche le contact. Le deuxième mois, il dort mal, perd du poids, sa croissance est ralentie. Le troisième mois, il semble détaché, indifférent et ne témoigne plus aucun intérêt ni pour les personnes ni pour le monde extérieur. De manière générale, la dépression du nourrisson s’exprime par des comportements de balancements et de rythmies. Pleurs prolongés, troubles du sommeil, absence de prise de poids, anorexie, régurgitations sont des indicateurs de désarroi du bébé face à une mère déprimée.
Si aujourd’hui les situations observées par Spitz ont pratiquement toutes disparue, d’autres facteurs sociaux-pathologiques sont apparus et se sont multipliés avec le temps : le placement en foyer pour protéger l’enfant d’une famille dysfonctionnelle, la précarité, les familles nombreuses, mono parentales, la violence intrafamiliale, l’alcoolisme, la pathologie mentale d’un ou des deux parents, la maltraitance subie et le harcèlement scolaire.
Les enfants et adolescents déprimés :
On peut parler de dépression lorsque l’enfant vit des épisodes de tristesse intense et qui s’étirent dans le temps. La dépression est un trouble de l’humeur qui touche environ 3 % des enfants de 3 à 17 ans. Elle apparaît le plus souvent vers l’âge de 10 à 12 ans. Elle peut toutefois se manifester avant cette période, et même durant la petite enfance dans de rares cas.
Les sentiments persistants de tristesse, d’impuissance, de vide, de désespoir et de dévalorisation, perturbent le raisonnement de l’enfant ainsi que son humeur et ses comportements. Certains enfants peuvent aussi ressentir des symptômes physiques (mal au ventre, crampes) et psychologiques (dissociation, troubles de l’attention)
Les causes possibles d’une dépression chez l’enfant
Il existe plusieurs causes pouvant mener à une dépression chez un enfant. Ces causes peuvent être
· Génétique : Un des deux parents biologiques a ou a eu des troubles de santé mentale (particulièrement la dépression et la maladie bipolaire)
· Santé physique : Un enfant qui vit avec une condition médicale particulière ou une maladie chronique est plus à risque de développer une dépression.
· Le contexte familial : Le sentiment de honte en relation avec des sévices physiques ou sexuels. Il est témoin ou victime des violences intra familiales, des divorces, des séparations, l’aliénation parentale ou encore de la négligence.
· Stress sociétal : L’échec, le rejet, l’isolement, l’intimidation le harcèlement ou l’indifférence de ses proches,
· Des événements traumatisants : La séparation de ses parents, le deuil d’un proche, la maladie d’un parent, la perte d’un animal de compagnie, un déménagement, un changement d’école ou de garderie, etc.
Quels sont les signes de la dépression chez l’enfant :
Les tout jeunes enfants (3 et 5 ans) comprennent moins les émotions qu’ils vivent et ils arrivent encore mal à les exprimer alors ils font des crises de larmes ou de colère.
A partir de 7 ou 10 ans les symptômes de la dépression sont plus perceptibles par les proches :
· Un sentiment de tristesse persistant ;
· Une irritabilité anormale ;
· Des douleurs physiques, comme des maux de ventre ou de tête ;
· Un sommeil perturbé ;
· Une perte d’appétit ou de poids (l’enfant ne suit plus sa courbe de croissance) ou des troubles du comportement alimentaire (anorexie, boulimie) ;
· Un faible niveau d’énergie ;
· L’isolement fréquent ou constant de l’enfant vis-à-vis de son environnement familial ou scolaire ;
· Une perte d’intérêt pour le jeu, les passe-temps ou les autres activités ;
· Des changements observés à l’école ou à la garderie (dans le comportement, les habitudes ou les résultats scolaires) ;
· Une faible estime de soi.
Quelle sont les attitudes à adopter ?
Les parents et les éducateurs ont un rôle à jouer pour favoriser le bien-être de l’enfant et pour lui donner une bonne structure au quotidien. Soyez présent et disponible et accordez-lui une attention et un intérêt authentiques.Soyez empathique et montrez-lui que vous comprenez ses émotions (« Je comprends que ce que tu vis est difficile »). Installez et développez un climat de confiance mutuelle afin de pouvoir écouter avec empathie et une bienveillance non jugeante ses ressentis, ses chagrins, ses colères, ses émois …
EN CONLUSION, nous pensons que la dépression du nourrisson comme celle de l’enfant pourrait bien être le symptôme d’une carence affective ressentie dès les premières heures de la vie. Si des situations vécues comme des abandons viennent renforcer les effets délétères de la carence affective, alors la dépression risque fort de muter en trouble de l’émotion et plus précisément en trouble de la personnalité limite (Borderline).
A propos de Pierre Nantas
Pierre Nantas est psychothérapeute, spécialisé dans l’accompagnement des personnes borderline et de la souffrance au travail. Il est l’auteur de quatre ouvrages :
– La bienveillance, quand elle s’invite en psychothérapie
– Changer de vie, « yes you can » (co-écrit avec J.A.Pinçon)
– Le système borderline, histoires de familles. (co-écrit avec le Dr P.Menu)
– Faire face au trouble de la personnalité borderline (co-écrit Manon Beaudoin)