PARIS : 25e Colloque annuel du SER, agir pour une transit…
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PARIS : 25e Colloque annuel du SER, agir pour une transition énergétique au service de tous
Plus de 800 personnes ont assisté le 17 septembre au 25e Colloque du Syndicat des énergies renouvelables (SER), événement majeur du secteur de l’énergie.
À quelques jours de la constitution du gouvernement Barnier, le Président du SER, Jules Nyssen, s’est adressé, dans son discours introductif, au nouveau Premier ministre, Michel Barnier qui, retenu par la constitution de son Gouvernement, n’avait pu honorer l’invitation que le SER lui avait fait parvenir.
Jules Nyssen a rappelé que, suivant la Cour des Comptes, la fiscalité constitue l’instrument le plus structurant de la politique énergétique et, qu’aujourd’hui encore, elle restait favorable aux énergies fossiles au détriment des énergies décarbonées. Dans la foulée, il a souligné que le projet de budget 2025 serait le marqueur du nouveau gouvernement souhaitant que la funeste lettre plafond proposée par le Premier ministre démissionnaire, proposant de faire de l’écologie le principal contributeur aux économies budgétaires, soit abandonnée et qu’a contrario, le Fonds Chaleur de l’ADEME soit augmenté à hauteur des projets déjà en portefeuille.
Il a ensuite présenté les 5 priorités du SER au nouveau gouvernement :
- La relance des processus de planification, SNBC et PPE, avec une urgence particulière pour l’éolien en mer.
- L’élaboration d’un pacte rural et citoyen pour le développement des énergies renouvelables.
- Le lancement d’une concertation sur la valorisation énergétique des différentes biomasses.
- Le déploiement d’une politique de développement industriel de l’ensemble de la chaîne de la valeur sur toutes les filières renouvelables avec une mise en œuvre ambitieuse du règlement européen NZIA (Net Zero Industry Act).
- La validation et et la mise en œuvre des plans d’investissement des gestionnaires de réseaux tenant compte des variations de l’offre et de la demande.
Les premiers débats ont ensuite porté sur la place de la transition énergétique dans le débat public.
Il en est ressorti que la réelle préoccupation des citoyens ne se traduit pas totalement dans l’expression électorale car le court terme, par exemple le pouvoir d’achat, est priorisé. Le grand public est très sensible à la notion de transition juste comme, par exemple, la rénovation énergétique des logements. Il se dit bien informé sur les causes et conséquences du dérèglement climatique mais beaucoup moins sur les solutions. Le climat pourrait avoir une place centrale dans les débats de la prochaine présidentielle et l’action climatique être perçue comme ayant un impact négatif sur le pouvoir d’achat. Il est donc important de mieux mettre en évidence les intérêts de cette action, notamment sur le pouvoir d’achat. La France n’est pas seule à lutter contre le changement climatique et les politiques mises en œuvre dans d’autres pays portent leurs fruits, Europe, Royaume-Uni, Chine et USA notamment. Les émissions mondiales de CO2 plafonnent et vont commencer à décliner.
Le soutien de l’État à la transition énergétique doit-il continuer ?
L’évolution des comportements des ménages, entreprises et collectivités doit être accompagnée par l’État. La Commission de régulation de l’énergie (CRE) rappelle qu’en 2022 et 2023, le soutien au développement des EnR électriques s’est transformé en soutien au budget de l’État par les EnR. Aucun levier ne doit être négligé : taxe carbone, réglementation ou subvention à moduler selon les secteurs. Le développement des EnR a encore un besoin de soutien public mais une évolution vers des mécanismes de marché (contrat privé entre producteur et consommateur, dit PPA, ou autoconsommation) est en cours. Les dispositifs de soutien doivent également évoluer pour que les EnR électriques apportent leur contribution à l’équilibre du système. Pour diminuer le coût des EnR, deux voies sont identifiées. La première est la simplification des procédures d’autorisations : si les coûts de l’électricité photovoltaïque sont beaucoup moins élevés en Allemagne ou Angleterre malgré un ensoleillement moins favorable, l’explication tient à la durée plus courte des procédures. Le prix de l’énergie fournie par le solaire et l’éolien est très sensible au coût du capital. C’est pourquoi, la deuxième voie pourrait venir de la Banque centrale européenne si elle accordait un taux préférentiel aux investissements dans la transition énergétique.
Les liens des EnR avec la ruralité doivent être renforcés
Les ressources en matières premières et le foncier se situent principalement dans les zones rurales, mais il existe aujourd’hui une méfiance à l’égard du solaire, en particulier de l’agrivoltatïque, pour lequel le milieu agricole a besoin de recul pour en mesurer les bénéfices et la réalité du partage de la valeur. Le solaire doit venir en complément et non en lieu et place de l’agriculture. Comme pour les productions alimentaires, les productions d’énergie vont aller du rural vers l’urbain, du producteur vers le consommateur. Pour rendre désirable cette réalité, le partage de la valeur doit être le plus large possible et profiter aux agriculteurs mais aussi aux citoyens et aux collectivités. Les SEM (société d’économie mixte) peuvent être un bon outil garantissant un retour sur le territoire. La loi APER (accélération des énergies renouvelables) freine actuellement le développement du solaire au sol et l’objectif de 100 GW est impossible à atteindre en se limitant au solaire en toiture.
La transition énergétique est aussi une question de souveraineté
Les ménages français ont consacré en moyenne 3 500 €/an à leur consommation d’énergie en 2022. Avec les consommations de l’industrie et du tertiaire, cela conduit notre pays à importer 5 milliards d’€ d’énergie fossile chaque mois, malgré la baisse des prix de l’énergie sur les marchés internationaux. Pour les EnR, il n’y a ni fluctuation, ni embargo possible. Les entreprises commencent à se décarboner sous la pression de leurs clients et de leurs employés, d’autant que les EnR, vues comme intermittentes, sont fiables et compétitives même en intégrant le coût des moyens de flexibilité (stockage, adaptation de la demande, interconnexions…) nécessaire à l’équilibre du système. En témoignent les nombreux projets de PPA identifiés pour les 3 années à venir. La souveraineté, c’est aussi le développement industriel dans le secteur des EnR et l’État doit accompagner la réglementation européenne NZIA (industrie zéro émission nette).
Les gestionnaires de réseaux électriques, transport et distribution
Les gestionnaires de réseaux électriques, transport et distribution ont développé des Plans stratégiques à l’horizon 2040 qui doivent leur permettre de renforcer leur résilience face à la montée des événements climatiques extrêmes, d’accueillir les nouvelles EnR et de développer les nouveaux usages de l’électricité dans le bâtiment, les transports et l’industrie. Cela nécessitera des investissements massifs, le développement d’une filière industrielle et un renforcement des compétences humaines dans les techniques de l’électricité. La planification de ces développements est nécessaire pour optimiser les coûts et doit être faite en coordination avec les développeurs de projets EnR.
À côté des filières électriques, les bioénergies jouent un rôle incontournable dans la transition énergétique
Mais peuvent-elles assumer toutes les demandes qui les attendent dans le futur ? Issues de la matière végétale ou animale, les bioénergies sont multiples et pas nécessairement substituables entre elles. Le contexte est celui d’une priorité pour le rôle alimentaire de la biomasse et de décroissance de son rôle de puits de carbone due au changement climatique (feux de forêts, insectes ravageurs, sécheresses…). La première utilisation en France est celle du bois énergie avec le Fonds Chaleur de l’ADEME, optimal du point de vue de son efficacité CO2 mais aussi de préservation du pouvoir d’achat des millions d’usagers. Son utilisation dans l’habitat individuel, grâce au label Flamme Verte et à la rénovation énergétique des logements, va permettre dans les années à venir d’augmenter de 15 % le parc d’habitations chauffées au bois tout en diminuant la consommation de 20 % et les émissions de CO2 de 40 %. Le biométhane, une des principales voies de décarbonation du secteur agricole, devrait, de son côté, représenter en 2030 20 % de la consommation de gaz. Il permet d’exploiter les déchets organiques, notamment agricoles, sans toucher à la production alimentaire. Le concept de “merit order” proposé par le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) pour une ressource considérable mais limitée doit s’appuyer sur plusieurs critères : efficacité énergétique, possibilité d’alternative et intérêt sociétal. Le SGPE l’élaborera avec l’éclairage du GIS (Groupement d’intérêt scientifique) mis en place entre l’ADEME et l’INRAE. Ce dernier visera une modélisation territoriale des ressources et des consommations avec une priorité aux co-valorisations avec primauté à l’alimentation. Les concertations régionales (COP) seront importantes de ce point de vue. La transition énergétique sera territoriale.
Quelles sont les positions des parlementaires ?
Le colloque s’est conclu par un échange entre les parlementaires sur leur vision court et moyen terme de la transition énergétique. Les principaux partis politiques, NFP, LR, Parti Présidentiel étaient représentés à de très bons niveaux. Seul le RN avait décliné l’invitation du SER. Les débats ont porté principalement sur deux points : le projet de budget 2025 et les outils de programmation. Sur le budget 2025, des lettres plafond ont été envoyées par le Premier ministre démissionnaire aux différents ministères préconisant des mesures d’économies. L’écologie est la cible principale de ces préconisations, dont aucun des parlementaires n’a eu communication. Un consensus se dégage pour dire que c’est un moment de vérité et que la rénovation énergétique et le Fonds Chaleur de l’ADEME ne doivent, en aucun cas, faire l’objet de coupes. Antoine Armand, devenu depuis ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie (mais pas du Budget qui est rattaché directement à Matignon), affirme le besoin de stabilité et l’importance de ne pas faire des économies sur l’écologie. Sur les outils de programmation, Loi Énergie Climat, PPE et SNBC, le même consensus se dégage avec le constat qu’une majorité absolue pourrait se réaliser tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale sur le principe d’élaboration de ces outils et qu’il pourrait y avoir une majorité absolue à l’Assemblée nationale sur un socle nucléaire existant, développement des EnR et Sobriété. Ce serait l’occasion de transposer à l’échelon national l’objectif européen de 44 % dans le mix national, adopté par la France au niveau européen. En dehors de ces deux sujets essentiels, plusieurs parlementaires ont évoqué la nécessité d’une politique protectionniste à l’égard des produits chinois qui bride les développements industriels européens dans les filières des énergies renouvelables.
Ce bref compte-rendu vise à refléter les débats et non à exprimer mes propres opinions.
Jean-Louis Bal, Président d’Agir pour le climat
SOURCE : La lettre du climat – Septembre 2024.