AVIGNON : Canicule tardive et changement climatique en PA…
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AVIGNON : Canicule tardive et changement climatique en PACA, des agriculteurs témoignent
Après un premier épisode en juillet, la canicule tardive qui a marqué la semaine passée dans toute la partie sud du pays avec des températures extrêmes enregistrées pendant plusieurs jours, notamment dans la région PACA, les agriculteurs ont pu constater certains dégâts.
L’association Conséquences revient sur cette vague de chaleur exceptionnelle, ses liens avec les changements climatiques et donne la parole à deux agriculteurs du Vaucluse qui subissent les impacts répétés et cherchent à s’adapter.
Une canicule attribuable aux changements climatiques
La période estivale pendant laquelle cette canicule survient ne doit pas faire oublier que les vagues de chaleur sont la marque des changements climatiques et d’une tendance claire vers des étés avec plus de canicules, plus longues et plus fortes. Climate Central, un consortium de climatologues et de journalistes a publié une première étude qui attribue cet épisode aux changements climatiques d’origine humaine. De la même façon, un consortium d’instituts de recherche européens a publié une étude spécifique sur la vague de chaleur qui a traversé la France qui en fait un événement unique, qui ne serait pas survenu sans les changements climatiques.
Pour l’agroclimatologue Serge Zaka, qui collabore régulièrement avec l’association Conséquences : “ Les canicules tardives sont un phénomène relativement récent dans la climatologie française. La plus intense canicule tardive observée jusqu’à présent remontait à 2012. Il est remarquable de noter que sur les six occurrences de canicules tardives enregistrées en France depuis le début des relevés météorologiques, toutes sont survenues après l’année 2000. Cette période de canicule risque d’avoir des conséquences sur certaines cultures maraîchères, arboricoles ou la vigne dont l’ampleur reste à évaluer. Certaines cultures ont des limites physiologiques autour de 35°C : plusieurs jours au-dessus et les fruits meurent ou les arbres se mettent en veille”.
Vaucluse : pour Jean-Michel Durand, arboriculteur, “il faudrait déclencher un état d’urgence climatique”
Des pommes brûlées sur la surface et invendable en l’étatPour Jean-Michel Durand, arboriculteur et maraîcher de père en fils à Cavaillon (Pommes et poire, potimarron, courges butternut, etc.) en Agriculture Biologique : “ La situation est catastrophique. Mercredi 23 août à 17h, une sonde sur un potimarron donnait une température de 51,3°c. Certains d’entre eux sont fendus, d’autres sont brulés en surface et donc ne seront pas commercialisables en l’état. Si on trouve des débouchés, ils seront valorisés pour la transformation dans le meilleur des cas, mais avec des pertes financières conséquentes. Les arbres, eux, face à de telles températures, se mettent en veille végétative générant un blocage du grossissement, et un pourcentage non négligeable de coup de soleil sur fruits Mercredi 23 août à 17h, une sonde sur un potimarron indique 51,3°centraînant une déclassification d’une valorisation du frais en industrie. La succession de “coup de chaud” et d’accidents climatiques récurrents a un impact d’année en année. Par exemple, ce mois d’août a battu encore un record : Il n’y a jamais eu 4 jours consécutifs de canicule à plus de 40°C après le 15 août dans le Vaucluse.
Le verger est déséquilibré et voit sa durée de vie réduite. Lorsque l’on a un verger dans cette région, avec le mistral asséchant -taux d’humidité extrêmement bas au mois d’août et vent entre 50 et 83km/h entre le 3 et le 7 août- et avec une nappe phréatique déficitaire, c’est très difficile de s’adapter au changement climatique. C’est à se demander s’il est encore possible de produire de la pomme ou de la poire dans la région, sans aborder la question de la transmission à la génération future dans de pareilles conditions. Néanmoins, on tente de mettre en place des solutions : garder un sol humide par arrosage gravitaire avec un enherbement haut. Concernant les conditions de travail de la récolte, on s’est organisés pour cueillir tôt le matin en ne faisant malheureusement que des demi-journées. Selon moi, il faudrait mettre en place un état d’urgence climatique au niveau national et actionner des aides ciblées auprès des agriculteurs subissant le même préjudice pour sauver la filière agricole.”
* Sur l’exploitation de Jean-Michel Durand, des pommes brûlées sur la surface et invendable en l’état. Ce mercredi 23 août à 17h, une sonde sur un potimarron indique 51,3°c
Vaucluse : pour Didier Brun, viticulteur, “certaines de mes vignes ne vont pas survivre à ce dernier coup de chaud”
“Les variations de températures extrêmes ont un impact sur la viabilité de l’exploitation. L’enjeux dans la culture de la vigne, ce n’est pas forcément le temps présent, mais le cycle de culture sur l’année et son bilan hydrique. Ces derniers jours j’ai pu constater que certaines de mes vignes ne vont pas survivre à ce dernier coup de chaud, mes oliviers quant à eux ne produisent pas. Ma préoccupation principale du moment c’est quand récolter. Si le taux de sucre des raisins est bon, la maturité phénolique elle n’est pas encore atteinte. Il y a quelques années j’avais encore des cerisiers en coteau, mais ils dépérissent à cause du manque d’eau sur le territoire.
Pour adapter mon exploitation, j’ai dû me lancer dans l’agroforesterie ce qui consiste à introduire des arbres dans les vignes. Il faut beaucoup de suivi et de temps pour suivre leurs développements. Cela pose la question des moyens pour financer cette transition agroécologique . Le changement climatique nous amène à un bouleversement total de l’organisation du travail dans la ferme et réduit la capacité à encaisser les aléas naturels et les pertes de récoltes liées. C’est stimulant dans la quête de solutions, mais en même temps cela fragilise la viabilité des exploitations paysannes. C’est pourquoi il est essentiel de se regrouper en collectif afin de partager et de transformer nos méthodes”.